Forfait Jour : autonomie réelle de rigueur !
-Selon une enquête “Autonomie dans le travail” de la Dares publiée le 4 avril 2019, il ressort qu’autonomie va de pair avec épanouissement professionnel.
Sans surprise, ce sont les cadres qui se sentent le plus valorisés et apprécient le plus les tâches qui leur sont confiées.
Pour autant, tous les salariés relevant du statut cadre ne jouissent pas nécessairement d’une autonomie réelle dans leur organisation de travail.
Il s’agit là d’une exigence en matière de durée du travail, qui peut échapper à l’employeur, tenté de conclure des conventions de forfait annuel en jours avec tous les cadres de l’entreprise, pour s’affranchir du paiement des heures supplémentaires.
En effet, seuls les cadres dits “autonomes” peuvent se voir proposer une convention individuelle de forfait annuel en jours (sous réserve qu’un accord collectif d’entreprise ou de branche le prévoit).
Selon l’article L. 3121-58 du Code du travail, seuls sont autorisés à conclure une convention de forfait annuel en jours, les cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps, et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’entreprise.
Or, jauger et apprécier in concreto le degré d’autonomie n’est pas forcément évident.
Cette problématique est soumise au contrôle des juges, qui délimitent strictement (et “sévèrement”) cette notion de “cadre autonome”… comme en témoigne un arrêt récent de la Cour de cassation (Cass. soc., 27 mars 2019, n°17-31.715)
L’affaire concernait un salarié exerçant, au sein de la Société Euro Disney, les fonctions de “concepteur son événementiel”, statut cadre.
A la suite de son licenciement, il a remis en cause la convention individuelle de forfait annuel en jours, et a réclamé un rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires et de diverses indemnités dont celle de travail dissimulé (correspondant à 6 mois de salaires).
Pour ce faire, il indique n’avoir été qu’un simple exécutant, soumis à des plannings précis, et que, de par sa nécessaire collaboration avec d’autres services soumis à des horaires précis, il était lui-même tenu d’observer ces mêmes horaires prédéterminés.
La Cour d’appel de Paris, puis la Cour de cassation, ont suivi son raisonnement.
Se bornant aux faits exposés, la Haute Cour a en effet jugé que les conditions de validité de la convention de forfait n’étaient pas remplies, puisque l'organisation du travail était totalement organisée et imposée par l'employeur.
Si, à l’instar de l’Oncle Picsou mais sans son indécent succès, la société Euro Disney, a cherché à faire des économies par la signature de cette convention illicite de forfait jours, elle s’est ainsi vue contrainte de verser de lourdes condamnations à son ancien salarié qui, lui, s’est retrouvé “au Pays des Merveilles”!
En conclusion, et par cette décision, la Cour de cassation a confirmé et même renforcé sa jurisprudence stricte selon laquelle la présence d’un planning contraignant et d’horaires prédéterminés ne peuvent coexister avec une clause de forfait annuel en jours (Cass. soc., 15 déc. 2016, n° 15-17.568).
A l’heure où le Chef de l’Etat rappelle que les 35 heures ne demeurent qu’une référence “légale théorique” et se réapproprie le fameux mantra d’un de ses prédécesseurs “travailler plus pour gagner plus” avec la défiscalisation des heures supplémentaires (plafonnées à 5.000 € par an), gageons que les chefs d’entreprise éviteront désormais le piège de la tentation du forfait jour!
A RETENIR - CONDITIONS DE VALIDITE DU FORFAIT JOUR -
Outre l’autonomie réelle du salarié, l’employeur doit aussi s'assurer régulièrement :
- que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail,
- et de la bonne articulation entre l'activité professionnelle du salarié et sa vie personnelle.
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